La grande distribution se mobilise contre le gaspillage : les mesures mises en place

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Le gaspillage de produits alimentaires est un fléau mondial. Pertes à la production, millions de tonnes d’invendus, achats irraisonnés… Du champ à l’assiette, toute la chaîne alimentaire doit relever le défi pour obtenir des résultats durables. Depuis plusieurs années, les distributeurs cherchent des solutions pour réduire leur impact. Une mobilisation à la hauteur de la force de frappe des magasins de grande distribution.

 

Près d’un tiers de la production mondiale, selon la FAO, plus de 87 millions de tonnes dans l’Union européenne, quelque 10 millions en France chaque année. Les chiffres des pertes et du gaspillage donnent le tourni. Assainir la chaîne alimentaire apparaît comme un défi d’actualité global. Non seulement du point de vue du développement durable, mais aussi économique. En France, le gap commercial est estimé à 16 milliards d’euros

 

La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) de 2020 fait suite au pacte national de 2013 ou encore à la loi Garot de 2016. Elle enjoint les distributeurs à réduire le gaspillage de nourriture de moitié par rapport aux chiffres de 2015. Et ce d’ici 2025. Le label anti-gaspi, lancé en 2023, distingue par ailleurs les opérateurs contribuant à l’objectif national. Selon l’Ademe, les enseignes de grande distribution pèsent pour 14% de ces déchets. Elle s’est donc engagée à lutter contre le gaspillage alimentaire, dans le sillon de la législation. 

 

Quelles sont les mesures anti-gaspi déployées par les entreprises ? L’efficacité alimentaire demandant une réponse à 360, la grande distribution est sur tous les fronts car elle détient un rôle clé.

Sensibiliser les employés et les clients

La pédagogie est un levier important pour les grandes surfaces. Principale cible : les consommateurs, responsables de 33% du gaspillage des produits alimentaires. Ils ont souvent tendance à acheter en trop grande quantité, mais aussi à délaisser les articles mal calibrés et un peu moins jolis. 

 

Aussi, plusieurs distributeurs s’engagent aux côtés des fournisseurs pour réduire la casse. Les groupes Leclerc, Monoprix ou Cora sont partenaires du collectif Les Gueules cassées. Carrefour a d’ailleurs lancé sa marque Tous anti-gaspi. Intermarché a, quant à lui, été l’un des premiers à promouvoir les fruits et légumes moches dans ses rayons. 

 

De l’autre côté de la chaîne, les acteurs de la grande distribution favorisent aussi les bonnes pratiques de leurs fournisseurs.

 

La sensibilisation se fait aussi en interne. Les magasins recourent de plus en plus à des coachs anti-gaspi, comme ceux de l’entreprise Phenix. Ces derniers épaulent les hyper et supermarchés dans leur démarche « zéro déchet alimentaire ». L’enseigne Cora recrute même ses propres coachs. Plus globalement, le personnel peut suivre des formations pour mieux comprendre les enjeux du gaspillage alimentaire.

Travailler sa gestion produits

Autre axe de travail : la date de péremption. Sur les produits périssables, le client retrouve deux mentions sur divers produits de son alimentation. 

 

La date limite de consommation, ou DLC, indique la date à partir de laquelle un produit présente un risque pour la santé. La DDM désigne la date de durabilité minimale, le « À consommer de préférence avant le ». Une fois dépassée, le produit peut perdre en qualité organoleptique mais reste consommable sans danger. 

 

Les magasins Carrefour ont décidé de prolonger la durée de vie d’au moins trois cents références alimentaires, dont les yaourts natures. Sur une cinquantaine d’entre elles, comme le sucre, le vinaigre ou le sel, la date de durabilité minimale a été complètement supprimée. Une démarche permettant d’allonger le temps en rayon de certains produits et d’éviter aux consommateurs de jeter des aliments encore consommables. 

 

D’après la dernière loi, DLC, DDM et numéro de lot peuvent désormais apparaître dans les codes barres, afin d’améliorer la gestion des stocks. Les outils de détection des dates courtes en rayon permettent de limiter le gaspillage et de faciliter le travail des équipes. Cette tâche relève en général des employés commerciaux, véritables vigies de l’hygiène et de la sécurité alimentaire.

 

Mais c’est dès l’entrepôt que la grande distribution doit entreprendre la réduction du gaspillage, en évitant les ruptures de la chaîne du froid. De tels incidents conduisent les denrées directement à la poubelle et accentuent davantage le gaspillage alimentaire.

 

Resserrer la gamme des produits disponibles en magasin constitue un moyen simple et rentable de limiter la casse. Selon un audit de l’Ademe, en 2016, dans certaines grandes surfaces, moins de 1% des références engendraient en moyenne 20% de gaspillage alimentaire en valeur. Une petite part des aliments est donc, à elle seule, une des causes principales des pertes en supermarché. 

 

Les produits qui se vendent mal sont ainsi confrontés à l’expiration de leur date de consommation. Ils deviennent des invendus et finissent bien souvent à la poubelle si l’entreprise ne réalise pas les démarches de valorisation alimentaire nécessaire.

Valoriser les invendus

Heureusement, il existe de nombreuses façons de donner une seconde vie à ces aliments prêts à être jetés et que la loi interdit de détruire. La majorité des solutions sont simples à mettre en place et demandent simplement une nouvelle organisation. 

 

Il y a d’abord le don aux associations. Les supermarchés et hypermarchés peuvent écouler les invendus alimentaires en les donnant aux banques alimentaires, Croix rouge et autres Restos du cœur. Monoprix, notamment, est signataire d’une convention d’engagement volontaire avec le groupe Casino et le ministère de l’Écologie et du développement durable.

 

Depuis 2020, l’interdiction de destruction concerne aussi les grossistes. Les contrôles et sanctions ont été renforcés. L’amende peut atteindre 0,1% du chiffre d’affaires de l’entreprise à l’exercice clos. 

 

Autre option, le retour des denrées aux agriculteurs. Les fruits et légumes dégradés font le bonheur du bétail et évitent de les jeter.

 

Les applications pour promouvoir ses invendus offrent une autre voie de valorisation. La plus connue sur les stores, est Too good to go, utilisée par la majorité des supermarchés en France tels que Carrefour, Auchan et Leclerc. Ce système a permis de sauver plus d’1 million de repas proposés dans des paniers à dates très courtes et à prix cassés contenant des fruits et légumes, des produits d’épicerie et bien d’autres denrées alimentaires. Du bistrot du coin aux grandes chaînes, la restauration s’est elle aussi emparée du sujet en proposant des paniers complets et économiques. 

 

Il complète les rayons dédiés mis en place par certaines enseignes, comme Delhaize avec ses No waste corners. Les rayons anti-gaspi comptent parmi les plus prisés des grandes surfaces, grâce à une réduction intéressante sur les prix permettant de faire une belle économie sur les consommables.


Association, application ou encore rayon dédié aux produits à dates courtes, les entreprises ne manquent pas de solutions pour limiter leurs impacts sur l’environnement et valoriser la nourriture prête à expirer.  

Transformer jusqu’aux déchets

Dernière solution, la transformation des invendus. Fruits, légumes, pain, poisson sont autant de soupes, brioches ou terrines en devenir. C’est le filon exploité par Leclerc, avec ses ateliers d’insertion Bon et Bien permettant de réutiliser les produits d’épicerie.

 

En dépit d’efforts soutenus, certains invendus n’échappent pas à la benne. Mais il est encore possible de valoriser ces déchets. Auchan a opté pour la biométhanisation, quand Système U s’est attelé au compostage. Pour optimiser ses résultats, Carrefour fait les deux. Depuis 2017, deux cents camions roulent au biométhane et livrent des points de vente à Paris, Lyon, Bordeaux, Marseille et Lille.

 

Comme tout autre facteur de démarque, le gaspillage est traqué par la grande distribution. Avec 400 000 euros de perte moyenne chaque année par magasin, la mobilisation pour l’alimentation est primordiale et se démocratise de plus en plus dans plusieurs pays du monde. Les métiers du commerce et de la logistique, auxquels préparent les formations IFCDIS, sont en première ligne de la lutte anti-gaspi. 

 

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